Tuesday, April 28, 2015

J’avais longtemps cru que l’amour était une chose exceptionnelle.
Grandiose.
Ce je-ne-sais-quoi qui s’écrie à tue-tête comme un bébé affamé.
Qui s’étale comme l’éventail du paon.
Orgueilleusement.
On n’a qu’à lui offrir les yeux grands ouverts pour le voir de près.
Et s’en saisir alors.
Avidement.
Je le cherchais donc, ce géant, guettais, épiais, courais après, tâtonnais à quatre pattes.
Plus les années s’écoulaient, plus je l’imaginais se montrer au grand jour devant moi.
Gigantesquement.
Exploser en milliers de lambeaux étincelants.
Jusqu’au jour où un vieux clochard me dit :
Prends des lunettes.
Si ça ne marche pas, achète une loupe.
Si ça ne va pas encore, ferme un œil.
Toujours pas ? Ferme les deux.
C’est seulement alors que je l’entrevis.
Quelque part entre le sommet de la tour Nebojša et les ténèbres profondes du puits romain.
Dans les yeux d’un enfant poursuivant des papillons.
Il sortit de sa niche.
Petitement.
Comme une larme d’orphelin.
Timidement.
A la troisième personne.
Quelque part à mi-chemin entre il, elle et on.
Entre deux clins d’œil et deux feux clignotants.
S’approchant de moi, il me chuchota : Tu comprends maintenant ?
Je répondis que oui.
Passionnément.
Il dépasse la mesure humaine par sa petitesse.
Tout simplement.